mardi 4 décembre 2018

Famille recomposée en Thaïlande : un puzzle à deux pièces


Le mariage thaï selon Deposit photo

Sujet que j'aborde avec les plus grandes précautions...

D'abord je n'ai pas l'expérience personnelle d'une famille recomposée. Je me fonde sur les aventures et mésaventures de mon ami Jack, abandonné par sa femme thaïe et bien plumé à l'occasion. Il est père d'un enfant âgé d'un an dont il a récemment récupéré la garde à la suite d'une bataille juridique brève - j'en suis encore étonné.

Après s'être remis de ses émotions, Jack a cherché une nouvelle compagne sur internet. Il a trouvé, et la jeune femme est mère d'une fillette de cinq ans qui vit avec sa grand-mère (maternelle). Alors que la mère travaille essentiellement sur internet.

Un cas ne permet pas de conclure. J'ai clairement conscience de la variabilité des réponses à la question des familles recomposées. Selon l'âge, l'origine sociale et le niveau d'étude. Selon la culture urbaine ou rurale. Et bien sûr selon le type de mariage - avec un farang ou 100% thaï.

Ce que j'essaye d'établir, c'est que la notion de famille recomposée n'est pas identique en Thaïlande et en France. Tu me diras : le contraire serait étonnant ! Mais je vais aller plus loin et essayer de préciser ces différences.

Une chose clairement établie, c'est que la famille a un poids énorme en Thaïlande.

On pourrait en inférer que le lien entre la mère et ses enfants est exceptionnellement fort. Peut-être… Néanmoins, une recherche sur les femmes entre 30 et 40 ans sur divers sites de rencontre fait remonter un nombre surprenant de "sans enfant". En réalité, il faut lire : "sans enfant à charge". Des enfants, il y en a, mais ils vivent chez leur grand-mère, séparés de la mère pendant la semaine. Ou plus longtemps.

En Thaïlande, on ne ressent pas cette mystique attribuée à la maternité en occident. On ne verra pas dans les temples bouddhistes ces innombrables tableaux de la mère et l'enfant qui ornent les églises et les musées occidentaux. Et pour cause : c'est un concept religieux catholique.

Il imprègne encore la société occidentale, alors que la religion n'est plus là. Une forme niaise et outrancière de psychologisme et de psychanalyse a pris le relai. Qu'on voit régulièrement émerger sur les sites proposés aux "mamans".

Apparemment, la Thaïlande en est exempte. S'occuper d'un enfant, c'est avant tout le prendre en charge sur le plan matériel. Pas de "triangulation œdipienne", pas de "dyade mère-enfant"... La mère élève, éduque, mais ne s'attribue pas un pouvoir quasi-magique de structuration de l'esprit de sa progéniture.

Les horaires scolaires sont larges mais ne peuvent couvrir les plages horaires de ce type de métier. Que faire ?

L'amour maternel existe, mais il faut bien gagner de quoi vivre. Les femmes sont fortement impliquées dans l'économie du pays, elles tiennent des boutiques ambulantes - ou non - ce qui implique un très grand nombre d'heures de travail. Difficile d'imaginer le papa thaï changeant les couches. Alors elles se tourneront naturellement vers leur propre mère pour lui confier l'enfant - et si possible, lui donneront de l'argent pour marquer son attachement plus que pour la défrayer.

Quand il y a divorce, la situation matérielle est souvent plus tendue pour la mère - qui obtient en général sans difficulté la garde de l'enfant. Ce qui n'empêche pas de le confier à la grand-mère paternelle si les conditions sont plus favorables.

Sur un site de rencontre, les femmes thaïes savent qu'elles seront plus intéressantes si elles se présentent sans enfant. Quoique… certains farangs ont déjà eu des enfants en occident et se disent qu'une femme déjà mère ne va pas les tanner pour en avoir d'autres. C'est une question d'âge : avoir un enfant de deux ans dans les pattes, c'est plus lourd qu'un enfant de seize ans... dont on espère qu'il va bientôt travailler.

Les femmes thaïes seront contentes de trouver un soutien chez les farangs, supposé à l'aise et peu regardant. Soutien financier qui peut être lourd s'il faut payer une école privée en Thaïlande. Mais là, je ne veux pas m'avancer. J'ignore quelle est la pression exercée par la mère pour réintégrer ses enfants dans la vie du couple farang / thaï et les mettre à charge du nouveau mari. J'ai juste l'impression que c'est un peu une obligation pour lui.

Je n'ai pas non plus d'information sur les pensions du père génétique, ni sur la régularité avec laquelle elles sont versées. Les arrangements à l'amiable seraient plus fréquents que l'application de la grosse du tribunal. Étant donné la légèreté du contrôle fiscal dans le pays, il est de toute manière difficile pour le juge d'établir un montant de pension réaliste à travers les gains déclarés.

S'il n'y a pas eu mariage, je suppose que le père génétique est tenu de verser une pension. Encore faut-il qu'il y ait eu reconnaissance ou test ADN. Donc un texte qui est rarement appliqué : une thaïe de milieu modeste n'a certainement pas les moyens de payer un avocat. De plus, l'idée de passer par le tribunal n'est pas dans les mentalités.

Maintenant, la situation inverse : quand le farang a déjà un enfant avec une femme thaïe et qu'il en est séparé. Il y a là une forte asymétrie : dès que le farang a un enfant thaï, il devient le mistigri. Il faut qu'il cache l'existence de cet enfant s'il veut retrouver une compagne. Qu'il n'aille pas dire qu'il s'y intéresse, ce ne serait pas compris : l'enfant n'est pas considéré comme un centre d'intérêt naturel chez l'homme. Ou plutôt si, mais après la voiture, la boxe thaïe, le jeu, les maîtresses et la frime, du moins dans les classes moyennes. C'est à peine réducteur...

De plus, la jalousie (sans doute fondée) semble culturelle chez les femmes thaïes. L'enfant du père est ce qui raccroche objectivement ce père à son ex-conjointe. Et là, dès qu'on parle de l'ex, ça devient chaud…

Toutes n'indiquent pas dans leur profil si elles pratiquent la boxe thaïe. Une information qu'il faut penser à demander.

Enfin la mère aura souvent tendance à penser que la marâtre maltraitera son enfant.

Il ne s'agit là que d'impressions… Je n'ai pas de statistiques. J'ai quand même compté le nombre imposant de femmes se présentant comme "sans enfant" - mais on pourra toujours objecter qu'elles utilisent un site de rencontre, ce qui peut induire un biais de recrutement. J'en suis tout à fait d'accord.

Au final, la famille recomposée thaïe n'a rien à voir avec la joyeuse famille qu'on présente en occident dans les médias. Elle n'est souvent "recomposée" que d'un seul côté - le côté de la mère thaïe. Le lien mère-enfant est sans doute très solide, mais s'inscrit plus dans la communauté familiale et la lignée des femmes que dans une relation d'exclusivité.

Pour ce que ça vaut…

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