Coutume locale : une habitante du village fait les courses sur son caddie |
Aujourd'hui, entre deux averses, nous sommes allés dans le port de pêcheurs qui se trouve
sur la côte Est. Ao Yaï est un village lacustre, gentiment touché par le
tourisme : il ne vend pas encore de bols avec le prénom inscrit dessus (Médor, Rintintin...), mais propose des fruits
de mer et des poissons à des prix qui peuvent effrayer le thaï moyen. Et
la bière y est vendue 200% du prix qu'on paye à Korat.
Au restaurant, on
choisit dans le vivier ce qu'on va manger. La seafood est dopée au Maxiton : les crevettes agitent
frénétiquement leurs pattes, les poissons sautent dans tous les
sens, les crabes dressent leurs pinces avec fureur. Je craque sur des coquilles
Saint-Jacques préparées au fenouil... Au moins, je n'entendrai pas leurs
petits cris quand on les jettera sur le feu ! Alors que les hurlements
du poisson qu'on égorge... le regard pathétique que te jette le crabe qu'on plonge
dans l'eau bouillante, juste avant de couler... le visage lourd et douloureux de la gambas
qu'on coupe en deux vivante...
On m'a dit
qu'ici, les gens étaient très durs. Comme dans toutes les îles. Et
parfois très bêtes. Tel vend petit à petit ses terres, il en a beaucoup
et elles valent de l'argent. Il achète une voiture de sport, une montre
en or à dix mille euros et toutes sortes de choses qui font qu'un beau
jour, il a vécu dix ans et se retrouve pauvre comme Job. Histoire véridique.
On
a vu la même chose à Belle-Île, Houat ou Hoëdic : quand des imbéciles
se retrouvent par hasard riches à millions, du fait du bond formidable
de l'immobilier. Mais ici, les gens sont infiniment plus aimables que
dans mes îles bretonnes où l'été, un sourire coûte beaucoup plus cher qu'un coup
de Père Julien au café du Port ou une crêpe dentelle.
On dit
que dans Koh Kut, tout se sait. Ça, j'ai très vite compris pourquoi. Il y a partout des chiens allongés au beau milieu de la route,
l'oreille collée contre le ciment. Impossible de les déloger, on a beau
klaxonner, ils ne bougent pas. Honneur à ces héros anonymes (Médor, Rintintin, c'est des noms, ça ?) qui risquent leur vie en service commandé ! Mais que font-ils donc ? Ils écoutent. C'est le système d'information de l'île. Un
véritable réseau secret, une toile mystérieuse qu'ils ont tissée... Ils se tiennent au courant, ils épient tout ce
qui se passe. Il doit y avoir des ondes aussi. Des ondes électriques. Peut-être magnétiques. Je ne serais pas étonné
qu'ils communiquent avec les militaires...
Les enfants du pêcheur : espiègles ! |
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