jeudi 13 octobre 2016

Chroniques de Koh Kut (III) : plus dure sera la chute...



Le village de pêcheurs pas loin de l'hôtel

Je suis trempé comme une soupe, car je suis sur ma moto et il pleut sans discontinuer depuis une heure. A Koh Kut, la mousson, c'est bien plus sérieux que dans l'Isan : il y a l'humidité de la mer, le relief qui fait écran aux nuages.

Je suis à l'arrêt, j'attends que Fon sorte de l'épicerie et je trouve le temps long sous les trombes d'eau. Un monsieur hoche la tête et m'adresse un sourire. Je lui renvoie son bonjour et lance :
- Atja fon dja tok ! Peut-être qu'il va pleuvoir !
Il me regarde bizarrement…

Et toi, au lieu de me lorgner comme un chien un évêque, réfléchis un peu ! Il n'est pas certain qu'il pleuve encore dans une heure. Peut-être qu'il va pleuvoir. Atja fon dja tok. Mais peut-être que non… Peut-être qu'on va enfin fermer le robinet de cette p... de douche !

- La pluie est en train de te dissoudre le cerveau, mon pauvre... Qu'achète Fon dans l'épicerie ? Pourquoi est-elle si longue ?

- C'est un mystère. Fon est toujours longue dans les épiceries. C'est un genre de pause mystique... Là, elle achète un cordial pour nous remettre de nos émotions.

- Que vous est-il donc arrivé ?

- Je roulais tranquillement dans une grande descente sur la route du Nord. Soudain, un triporteur conduit par l'homme invisible déboite à gauche et me coupe la route. Très impressionnant... Le propriétaire a oublié de mettre un frein à main qui n'existe pas, et le triporteur est parti tout seul... Alors je ralentis comme je peux sur la route mouillée... Le propriétaire s'élance, il court derrière le triporteur vide qui prend de la vitesse. Mais l'homme réussit à sauter dessus, il écrase le frein. Tout va bien… puisque je réussis à l'éviter in extremis et que nous ne partons pas dans le décor !

- Rencontrer l'homme invisible à Koh Kut ! Que d'émotion... Mais qu'alliez-vous faire dans le Nord ?

Les chutes d'eau, les plats qui font bien mal en sautant des rochers glissants : un des charmes de l'île


- Nous étions partis nous baigner dans une des trois chutes d'eau de l'île. Quand nous sommes arrivés, nous avons été accueillis par un panneau en quatre langues. Car à Koh Kut, les quatre puissances mondiales sont représentées : l'Amérique avec sa Guerre des Etoiles, la Russie, patrie du Spoutnik, la Chine et ses super-missiles, la Thaïlande et ses terribles piments. Je lis l'anglais et le russe, Fon me traduit le thaï en mimant l'enfilage d'un élégant cardigan. Et pour le chinois, je suppute. Apparemment, les quatre phrases sont identiques. Ce message unanime est très étonnant et ne peut s'expliquer que de deux manières différentes.

a/ la première interprétation fait la place à l'art consommé des thaïs à ne pas te prendre en défaut, ne pas te faire perdre la face. Il témoigne d'une extrême politesse. Il utilise un moyen détourné pour te faire comprendre une interdiction qu'il ne voudrait pas t'envoyer sèchement dans la figure.

b/ il s'agit d'un texte codé (cf. mon précédent post, la société des chiens) destiné à des chiens d'autres pays.

- Bon, mais que dit le panneau ?

- Il recommande poliment de bien vouloir enfiler une brassière de sauvetage quand on se baigne sous la chute d'eau.

- Une brassière de sauvetage ? Il y en a peut-être sur la côte, dans les bateaux des plongeurs ou sur la navette de l'île. Mais près de la chute d'eau ? Il n'y en a pas. J'ai peine à comprendre.

- Que tu es bête ! Quel idiot oublierait d'emporter sa brassière de sauvetage quand il va voir une chute d'eau ? Quel imprudent viendrait à Koh Kut sans sa brassière ? Quel(le) touriste étourdi(e) arriverait en Thaïlande sans emporter dans sa valise ses capotes anglaises, son plus beau bikini et son matériel de survie en mer ?

Sur le fond, la recommandation est loin d'être absurde. La chute d'eau a deux étages. Glisser sur les pierres gluantes, se faire rouler par le courant et tomber du second au premier peut être mortel. Mais ce n'est pas une interdiction déguisée. Juste un avertissement. Puis chacun prend ses responsabilités.

Oh, liberté chérie !... Ah, délicieuse Thaïlande…



Une histoire qu'on racontait quand on était petit : quelle est la différence entre une nourrice et un vieux pont.
Réponse : la nounou montre son sein et le pont s'affaisse. Oui, je sais...

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