mardi 5 décembre 2017

La main de ton frère sur la bourse de ta soeur


La politique de la terre brûlée : un classique thaï...

Dans mon précédent post, j'évoquais les questions d'héritage à la campagne. Je me demandais si dans les familles pauvres, la terre n'était pas avant tout perçue comme un outil de subsistance personnel plutôt qu'un bien spéculatif. En fait, la différence est ténue, et tout peut facilement basculer. Comme le montre la suite de cette histoire - l'histoire de la famille de Fon.

On se rappelle que les parents sont morts et qu'il reste 5 frères et sœurs en âge de travailler. Deux vivent à Bangkok, un ancien moine et une recluse. L'un des fils restant exploite la terre de sa femme. Les deux autres, le père de Fon et sa sœur cadette cultivent les vingts acres de l'héritage.

En réalité, le père de Fon n'est pas propriétaire des dix acres qu'il cultive. Mais dans la famille, on est trop pauvre pour payer les frais de succession : ça fait donc dix ans que la terre appartient à un mort et qu'elle est cultivée par un des héritiers sans contestation ni sans contrepartie pour les autres - chacun se débrouille avec ce qu'il a, avec philosophie.

Ce que j'ai appris depuis, c'est que les dix autres acres appartiennent légalement à la sœur. Elle vivait avec sa mère et s'est occupé d'elle jusqu'à sa mort. Bien avant que le coût des frais d'enregistrement ne s'envolent, la mère a fait donation de cette terre à sa fille qui détient maintenant la chanote - le titre officiel de propriété.

Il y a deux ans, l'ancien moine est venu rendre visite à sa sœur rustique. Il lui a demandé si elle pourrait lui prêter sa chanote pour cautionner l'achat de sa maison à Bangkok. La sœur n'a pas pu lui dire non - le principe d'entraide est encore très vif ici. Mal lui en a pris. Le frère a acheté sa maison, et dit maintenant qu'il n'a plus d'argent pour payer sa dette.

Comme souvent, l'emprunt n'a pas été contracté dans une banque, mais chez un riche prêteur - l'usure est un sport en vogue en Thaïlande. Maintenant, le prêteur exige son argent, et peut s'emparer des terres sans problème à ce qu'il paraît.

Que va faire la sœur ? Elle n'a pas vraiment le choix. Elle va rembourser le prêteur.

Il semble qu'il soit assez commun de s'engager les uns pour les autres en Thaïlande. J'ai entendu parler d'autres affaires. Avec les embrouilles et résultats calamiteux dont l'histoire de cette famille donne un exemple parmi d'autres. Stupidité ? Respect outrancier de devoirs de réciprocité ? Difficile à dire. Ce que j'observe, c'est que le problème vient du frère urbain : la ville endroit d'amoralité et d'oubli des traditions ? Avec la main de ton frère sur la bourse de ta soeur...?

Balisé par un simple chapeau de clown, Sa Majesté le Riz prend l'air sur le bord de la route...


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