samedi 7 avril 2018

La Baule-sur-Buddha


Sweet Thailand...

En 1880, il n'existait pas de station balnéaire nommée La Baule. A l'endroit où allaient surgir des villas familiales et bourgeoises, puis cinquante ans plus tard, une ligne d'immeubles aussi hideux que disparates, il n'existait qu'une dune de sable en forme de croissant, de huit kilomètres de long. Sans même un chemin : à quoi bon accéder à la plage ?

A l'extrémité nord de la dune, une ria boueuse, un petit port de pêche très actif, découvrant à marée basse, un bourg resserré autour d'une église et deux boulangeries : le Pouliguen. C'est là que j'ai passé - bien plus tard - une bonne partie de mon enfance.

L'endroit où nous allons habiter ressemble étrangement au Pouliguen. On y retrouve le petit port de pêche d'où partent des bateaux pour des campagnes de quinze jours. La longue jetée, la petite île en face, les rochers, la côte sauvage un peu plus loin avec ses falaises, la "petite chapelle" (bouddhiste), tout y est. Sur le front de mer, autour de l'Hôtel Beau Rivage, les constructions vouées au tourisme sont encore clairsemées. Un peu plus loin, encerclée par la forêt tropicale, une plage de sable blanc, déserte, inaccessible à marée haute, où les amoureux peuvent forniquer - comme sur notre Grande Côte.

Le soir, le bourg grouille de monde. La population locale est bigarrée : outre les musulmans égarés du sud et de la frontière malaise, il y a beaucoup de birmans qu'on reconnaît à leur maquillage blanc. Leur pays n'est qu'à cinquante kilomètres, et ils sont là pour la pêche. Réguliers, irréguliers, je n'en sais rien. Mais ils font partie du décor, ils semblent parfaitement intégrés. En revanche, les farangs se font très rares.

Jeux d'eau à l'escale pour les marins birmans. Secs et musclés comme des boxeurs thaïs.

Sur le terre-plein construit en face du bâtiment sévère de l'amphoe - la mairie pour faire simple - les jeunes jouent au foot et au basket. Un peu plus loin, une aire de jeux pour enfants. Une ligne de baraquements où l'on prépare des fritures de crevettes, petits restaurants où on dîne pour un euro, commerces de mangues, de Fanta vert ou rouge. Douce animation villageoise, beaucoup d'enfants et d'ados - les garçons font pétarader leurs mobs, les filles sont fraîches et parées comme des bonbons.

Ici, on se gare où on veut, on circule dans tous les sens, en se laissant passer car la rue est trop étroite pour deux voitures. Il règne un joyeux bordel et personne ne se plaint. Un sens unique ? Mais pour quoi faire ?

Notre nouvelle maison est à trois kilomètres du centre ville, sur ce qui serait l'anse Sainte Anne de notre Pouliguen thaï. C'est une villa surélevée, construite sur piliers, avec la cuisine au rez-de-chaussée, en bar. Elle est orientée vers l'est, ce qui lui permet de bénéficier des vents dominants, rafraichissants, qui dispersent les moustiques. Je pense qu'elle te plaira - au fait, tu viens quand ?

La vue de notre plage Sainte Anne, juste devant la maison - moins le gris...

De la fenêtre on voit les palmiers, les îles. Juste derrière, une grande usine d'huile de palme qui a été fermée il y a quelques années : son propriétaire ne payait pas ses impôts. Décor Beaubourg qui nous isole et nous préserve du bruit. Un peu plus loin, une bicoque au bord du sable. Un thaï y habite avec sa femme et sa fillette, c'est le gardien de je ne sais quel terrain. Il a une barque et m'a déjà proposé de m'emmener chasser près des îles, dans des endroits interdits - ce dont je me garderai bien.

Devant la maison, deux grosses dames accroupies cherchent des coquillages. De minuscules palourdes dont elles vont faire des soupes. Nul doute que dans dix ou vingt ans, il n'y aura presque plus de palourdes adultes. Il faudra légiférer, si ce n'est pas trop tard. Pour l'instant, nous sommes au début du cycle - un cycle qui fera sans doute disparaître de la plage toutes les bouteilles de plastique, les filets arrachés et les débris de klégécel. Mais transformera ce paradis en enfer. Alors pour l'instant, jouissons !


La maison surélevée, bien exposée aux vents de secteur Est. Au second plan, la belle raffinerie d'huile de palme - fermée


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