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Le "wat" de Donchompu, tout près de chez moi |
L'autre jour, je suis parti seul
en bus à la ville. A l'arrêt suivant, une fille s'est assise à côté de moi,
avec un grand sourire. Elle s'est tournée vers moi et m'a immédiatement
demandé si j'étais marié avec une thaïe. Je lui ai demandé en retour pourquoi
elle me demandait cela. Je n'étais pas du tout certain de la réponse, car les
thaïs sont d'une curiosité qu'ils ne tentent pas de masquer. Mais à coup sûr,
ma question la mettait dans une position embarrassante. Soit elle avouait cette
curiosité, ce qui était gênant, soit elle avouait un quelconque intérêt pour
moi, ce qui était impensable. Il y avait d'autres réponses possibles, mais sans
doute trop dans l'esprit d'un marivaudage que les thaïs ne semblent pas avoir.
Résultat, elle a baissé le nez, et elle a boudé pendant tous le reste de la route.
Plus tard, j'ai demandé à
Fon ce que j'aurais dû faire. "Ne pas répondre à cette question, faire
comme si elle n'avait pas été posée". Bien sûr… Tu sais comme moi qu'il
n'y a pas de questions indiscrètes, il n'y a que des réponses indiscrètes.
Je suis arrivé à Korat trop
tôt, et j'ai décidé d'aller lire dans l'espèce de jardin public (mais ce n'est
pas un jardin) qui se trouve dans le centre commerçant, près de la statue de
Yamoo, l'héroïne de la ville. J'ai trouvé un banc. Une jeune femme y était déjà
assise et elle m'a fait un sourire - ce qui ne veut strictement rien dire. Sauf
que… Sauf qu'un genre de mère maquerelle s'est approchée, et m'a proposé la
fille (pour exactement douze euros cinquante). J'ai décliné poliment mais piqué
de curiosité, j'ai regardé la fille de plus près : une figure banale, plutôt
agréable ; des petites dents de devant genre lapin, sympathiques et presque
sexy ; un corps juvénile ; une allure vestimentaire évoquant une jeune personne
allant faire son marché le dimanche matin, très relax, et autant de maquillage
que moi au réveil. Le degré zéro de la sophistication péripatéticienne.
Je suis ensuite remonté vers
le but de mon voyage, la piscine olympique que j'affectionne. Passant devant une
rangée de serruriers ambulants qui, pour certains, font encore les doubles de
clé à la lime. Puis devant une rangée de couturières, avec leur machine à
coudre sur le trottoir, abritée sous un parasol-parapluie. Dans dix ou vingt
ans, ces métiers n'existeront plus. Le savent-ils ?
Ensuite j'ai longé le
marché, avec ses profusions de fleurs dressées en bouquets sculptés, jaunes
d'or et pointes blanches, ses fruits du dragon en tas, ses ngos rouges
et hérissés. Et ses marchandes de poisson et de viande, aux étals couverts de
mouches, aux parfums forts.

A la piscine, l'eau était
vivifiante. Les pluies récentes torrentielles avaient descendu la température
d'un bon quatre degrés. Une eau un peu fraîche est plus agréable pour faire des
longueurs. Comme d'ordinaire, il n'y avait presque personne - juste cinq filles
qui apprenaient la brasse, en travers du bassin, mais sans aller jusqu'à ma
ligne d'eau. La pluie s'est mise à hacher l'eau pendant que je nageais.
Somptueux.
En sortant, j'ai retrouvé
Fon qui voulait aller à la pharmacie. Elle m'a emmené dans une étrange officine,
où l'on vend des herbes, des médicaments, et diverses choses, notamment du
"Cygne d'Or", ce faux whisky que les thaïs consomment massivement : un
nouvel antidépresseur d'action rapide ? Imagine un rayon Pastis dans une
pharmacie française…
Le potard, un petit homme
calamistré et doucereux a commencé une longue conversation avec Fon. Plutôt que
d'attendre, je me suis éclipsé pour acheter des bouteilles d'oranges pressées dont
je connaissais un point de vente fiable pas loin (fiable, car le jus peut être
coupé d'eau, ou sucré - ou les deux ; or cette vendeuse presse les oranges
devant toi - je te dirai l'endroit si tu veux).
Quand je suis revenu avec
mes bouteilles, Fon s'était fait refiler un médicament dont j'ai regardé la
composition : essentiellement du curcuma. Cher, pour cette épice banale aux
vagues effets digestifs : le prix d'une passe avec la petite prostituée de ce matin
!
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