
Pourquoi
y a-t-il de la musique dans les restaurants et les cafés, dans les magasins ? Est-ce
agréable ? A moins qu'on ne l'entende pas, elle est filtrée par certains
tubercules du cerveau - et dans ce cas, à quoi sert-elle ? Il faudrait que
quelqu'un m'explique. En attendant, je me lève, je paye et je pars, il faut que
j'aille changer de l'argent.
Banque
ou money changer, c'est pareil : les indonésiens ont un goût forcené pour les billets
de cent dollars : un billet de cent vaut plus que cinq billets de vingt. Encore
faut-il que la date du billet soit postérieure à… je ne sais plus quand. Sinon,
sa valeur est rétrogradée. Pourquoi ? Je l'ignore. Encore faut-il aussi que le
billet présente bien. Dans l'arrière boutique d'un money changer, j'ai vu une
femme repasser des billets avec un fer. Balle au centre : les thaïs adorent les
grosses coupures en euros. Un billet de cent vaut plus que deux billets de
cinquante. Pourquoi ? Plus facile à ranger dans une mallette…?
En
chemin, coup de téléphone de Yuni. Elle n'est pas allée au travail aujourd'hui,
elle accompagne Mohammad à l'hôpital. Mohammad n'est pas malade, mais son ami a
blessé une piétonne en manœuvrant avec sa voiture. Comme cet ami prend l'avion,
il a délégué les formalités à Mohammad. Et comme Mohammad ne parle pas vraiment
l'indonésien, il a demandé à Yuni de l'aider. Je ne suis pas loin de l'hôpital,
et je passe les voir. La salle commune ne comporte pas de box, les lits sont alignés
les uns à côté des autres. Il y a quelques chaises pour la famille. On entre
dans cette salle comme dans un moulin, malgré l'interdiction inscrite sur la
porte, et le garde. L'ensemble ne donne pas une impression très high tech.
Le
mari est là. Pour le réconfort moral sans doute, car la dame semble en pleine
santé, à part sa blessure à la cuisse. Yuni m'invite à regarder. La dame se
laisse faire. Face antéro-interne de la cuisse, huit centimètres de long, difficile
de savoir la profondeur sans sonde, mais je pense qu'il n'y a pas plus d'un
centimètre. La fémorale n'est pas très loin, mais indemne. La chair ouverte laisse
déborder des globules graisseux. Pas grand-chose en fait. Peut-être un plan
profond à envisager, vingt minutes maximum.
Yuni
achète du matériel à suturer. C'est le médecin qui a fait la prescription. Je
ne sais pas sur quels critères il se fonde, mais elle en a assez pour
désinfecter et suturer trois personnes. Sans doute faut-il montrer sa volonté
de réparation auprès de la victime. Y a-t-il des aspects moins clairs dans
cette prescription excessive ?
Cela
fait des heures qu'ils sont là tous les deux, Yuni et Mohammad. Ils vont rester
jusqu'à ce que la femme soit suturée, jusqu'à ce qu'elle quitte l'hôpital.
C'est le prix à payer. Sinon, la femme porte plainte. Tout est une question de
sollicitude, de résipiscence affichée. En théorie, l'intervention à l'hôpital
est gratuite (même si le matériel n'est pas fourni). Mais il faudra quand même
payer le médecin, indemniser la blessée. Le prix du sang. Et pour un bulé, la
note est toujours beaucoup plus salée. La femme à la cuisse ouverte réclame
quinze jours d'immobilisation, ce qui est manifestement exagéré. Il va y avoir
une négociation serrée, difficile.
Grâce à Yuni, Mohammad va s'en tirer à bon compte. Mais il va devoir supporter la réprobation de ses voisins, tous au courant, les visites à son domicile du mari, ses changements d'avis, ses chantages, la menace de voir l'affaire portée devant la police (ce qui l'obligerait à graisser deux pattes au lieu d'une, et pas qu'un peu - police et victime se liguant contre le responsable). Trois jours d'angoisse et d'insomnie absolue.
Mohammad est dégoûté. L'affaire est terminée, mais il ne veut plus habiter dans ce quartier.
Grâce à Yuni, Mohammad va s'en tirer à bon compte. Mais il va devoir supporter la réprobation de ses voisins, tous au courant, les visites à son domicile du mari, ses changements d'avis, ses chantages, la menace de voir l'affaire portée devant la police (ce qui l'obligerait à graisser deux pattes au lieu d'une, et pas qu'un peu - police et victime se liguant contre le responsable). Trois jours d'angoisse et d'insomnie absolue.
Mohammad est dégoûté. L'affaire est terminée, mais il ne veut plus habiter dans ce quartier.
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