mardi 5 mai 2015

Sendang Biru : pris au piège (journal de route 2)





D'ici un jour, mon téléphone sera déchargé et je serai coupé du monde. Il faut réfléchir posément au problème. Je décide d'aller me promener sur la plage pour me détendre.

C'est un endroit magnifique. Une grande baie de sable. Au milieu, une trentaine de bateaux de pêche. Etant donné la forme du shore break, assez fort et brutal, je suppose que le fond remonte très vite. Parallèle à la courbe parfaite de la mer, un chemin. D'un côté de la baie, il se perd dans une mangrove, et l'anse se prolonge vers le large par une chaussée de rochers sur lesquels la mer blanchit. De l'autre, c'est la montagne qui commence, avec un à-pic de roche noire d'une cinquantaine de mètres, tandis que le chemin débouche sur une pêcherie en béton. Entre les deux, le village, bas, protégé de la mer par une haie d'arbres. Derrière lui, une plaine avec des champs cultivés. Au fond, c'est la montagne. Plans de gris et de vert avec des nuances.

Champs de riz. Plantations de bananes. Ici, on coupe les feuilles des bananiers en rectangles pour en faire des fonds d'assiette - peut-être pour des restaurants à Malang. Des feux brûlent au loin. Beaucoup de cultivateurs - je vois des motos éparpillées à gauche à droite, et des silhouettes noires, courbées sur la terre. Décor d'une incroyable pureté, digne de Lost. Dommage, la lumière est un peu sale, et la mer est trouble - sans doute les dernières pluies.

Cet endroit est-il voué au même sort que Le Pouliguen, charmant petit port de pêche de Loire Inférieure chanté par Jules Sandeau[1], devenu un gros tas de merde touristique, pêcheurs morts, disparus, jamais remplacés, chalutiers bleus, verts, rouges, dont il ne reste plus que quelques côtes blanchies par le sel et le soleil au fond d'une vasière ?

Au milieu du village, un colporteur est arrivé avec sa camionnette. Les gens sont pauvres, la demande est faible. Le colporteur s'adapte, il propose quelques petites tranches de pastèque, quelques légumes, rien de bien intéressant.
Le soir tombe, je m'assois sur des marches et je regarde la mer. Au loin, une de ces pierres dressées au milieu de la mer que laissent les volcans. Toute la partie terreuse du cône est partie avec l'érosion. Il ne reste plus que la cheminée du volcan, rempli d'une roche métamorphique dure, qui résiste. Le sommet est couvert d'une chevelure de végétation verte, tandis que les flancs sont noirs, ils se précipitent à la verticale dans la mer. Le tonnerre commence à gronder. Je rentre dans ma cellule. La pluie crépite. Littéralement, une feuille de cigarette me sépare de mère Nature.

J'ai déjà dit que j'avais oublié le chargeur de mon appareil photo en Thaïlande. J'en ai acheté un à Semarang. Maintenant, c'est le chargeur du téléphone. En y réfléchissant, je peux peut-être utiliser le câble du chargeur photo pour recharger le téléphone. Je teste. Parfait. Le problème du téléphone est résolu. En apparence...



[1] L'île aux mouettes

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